Compagnies aériennes et avionneurs se mobilisent pour être en mesure de répondre à la croissance du prix du kérosène, à l’augmentation du trafic aérien et aux objectifs environnementaux fixés par l’Accord de Paris. Les énergies électrique et hybride représentent des voies technologiques capables de relever ces défis. Avant de nous pencher sur les projets ambitieux de l’hybride ou du tout électrique, rappelons-nous d’abord des différentes sources d’énergie de l’avion et regardons ensuite les métamorphoses que ce changement va impliquer.
Différentes sources d’énergie de l’avion
Le tout électrique ne signifie pas que les aéronefs n’utiliseront plus aucune autre source d’énergie, loin de là. En fait, actuellement, l’énergie primaire – la seule énergie primaire d’ailleurs – est le kérosène qui génère trois sources d’énergie secondaire (pneumatique, hydraulique et électrique). Ces énergies appelées non propulsives permettent d’alimenter diverses charges à bord et utilisent à peine 5 à 6 % du kérosène. Dans l’avion tout électrique, la seule énergie secondaire non propulsive serait l’électrique. Conclusion : on ne consomme que le kérosène dont on a besoin (plus besoin de maintenir sous pression un circuit pneumatique), la disponibilité des avions est plus grande (plus facile et rapide de réparer et de maintenir des installations électriques qu’hydrauliques). Passer à l’électrique implique toutefois une réorganisation de taille pour les avionneurs.
Une révolution interne en profondeur
L’industrie aéronautique classique est développée en silos, selon les chapitres « ATA », donc de façon très cloisonnée. L’électrification des avions va obliger les avionneurs à construire ou renforcer les passerelles non seulement techniques entre les différents systèmes, mais aussi organisationnelles. En effet, fini les anciennes habitudes de développer chacun de son côté une nouvelle et même technologie, avec redondance et gaspillage en prime. Ceux qui développeront une offre électrique rationnelle, transversale entre les systèmes, mais aussi les moteurs auront une longueur d’avance… à l’image de Safra qui a créé Safran Power et Safran Electronics.
Électrification à tous les niveaux
Actionneurs de commandes de vols de secours, démarrage des moteurs, pressurisation de la cabine… l’électrification des avions a bel et bien commencé. L’heure maintenant est à l’annonce de projets ambitieux. Voyez plutôt : Zunum Aero, soutenue par Boeing et JetBlue, devrait commercialiser en 2022 un avion hybride électrique transportant 12 personnes pour des liaisons maximales de 1100 km (à terme 50 passagers sur 1609 km) avec à la clé une réduction des émissions de CO2 (de 80 %), du bruit et du temps de vol (départs de petits aéroports d’où des files d’attente plus courtes); EasyJet et Wright Electric lanceraient leur premier avion électrique court-courrier vers 2027 avec un objectif de « zéro émission »; Airbus, Rolls-Royce et Siemens viennent de signer un partenariat pour développer à court terme un démonstrateur de vol de propulsion hybride E-Fan X qui devrait voir le jour en 2020 et constituerait une avancée certaine dans la propulsion hybride pour les avions commerciaux; la Nasa, dans le cadre du programme Sceptor (Scalable Convergent Electric Propulsion Technology and Operations Research), préfère travailler sur la modernisation d’un avion existant – facilitant la comparaison des performances – qui sera doté de moteurs électriques, comptera 9 places et pourrait voir le jour en 2019.
Que l’on se comprenne bien, le tout électrique est un objectif très ambitieux qui ne verra pas le jour avant des années, voire des décennies. Le temps de trouver une solution pour générer et stocker autant d’électricité. À moins que l’énergie du futur soit l’hydrogène…