Septembre 2017, United Technologies Corp. (UTC) rachète pour 30 milliards de dollars (dette comprise) l’équipementier Rockwell Collins, lui-même ayant finalisé, quelques mois plus tôt, l’acquisition de B/E Aerospace. Quelles sont les caractéristiques de cette transaction? Pourquoi tant de rachats, de rapprochements et de fusions dans le secteur aéronautique?
Une transaction à donner le vertige
UTC est un conglomérat américain qui cherche depuis plusieurs années à renforcer sa présence dans l’automation et dans l’aéronautique, ses divisions aéronautique (moteurs d’avions, système de ventilation, cockpit…) et systèmes de navigation aérienne représentant respectivement 23,6 % et 22,4 % de son CA actuel. Forte de ses 58 milliards de CA et de ses 200 000 employés, l’entreprise vient d’annoncer le rachat pour 30 milliards de dollars (23 pour les actions et 7 pour la dette) de Rockwell Collins. Ce spécialiste de l’avionique et des intérieurs pour cabines emploie, quant à lui, 19 000 personnes et réalise un chiffre d’affaires de 6 milliards de dollars. De cette acquisition va naitre une entité, baptisée Collins Aerospace Systems, qui pèsera 63 milliards de dollars de CA, dont 40 dans l’aéronautique, et qui lui permettra de résister aux pressions des avionneurs Airbus (67 milliards de dollars de CA) et Boeing (94,6 milliards de dollars de CA). D’après Greg Hayes, PDG d’UTC, « cette transaction ajoute des potentialités considérables à nos activités aéronautiques et renforce nos synergies dans les systèmes aéronautiques technologiquement avancés ». Mais pourquoi devenir toujours plus gros? Pourquoi se diversifier?
Des rapprochements pour affronter la concurrence
Les rapprochements des équipementiers aéronautiques constituent une réponse aux avionneurs qui, soumis à une rude concurrence et souhaitant maintenir leurs marges, mettent une pression sur leurs fournisseurs. Ces derniers se voient contraints de fusionner afin de miser sur des économies d’échelle pour rester dans la course. C’est ainsi que Rockwell Collins a racheté B/E Aerospace pour 6,4 milliards de dollars au cours de l’été 2017 et que Safran a fait l’acquisition de Zodiac Aérospatiale au printemps 2017. De plus, certains avionneurs élargissent leurs activités à celui des services (modification des cabines, connectivité des avions, traitements des données d’information…), leur permettant donc d’augmenter leur chiffre d’affaires et d’améliorer leur productivité. Ainsi, Boeing escompte bien profiter de ce marché des services, qu’elle estime à 2 500 milliards de dollars, et s’en donne les moyens en annonçant, en 2016, la création d’une division spécifique pour ce marché qui devrait réaliser annuellement un CA de 50 milliards de dollars d’ici 5 à 10 ans. Un manque à gagner pour les équipementiers? Sûrement! C’est pourquoi certains pallient ce problème en rachetant des entreprises œuvrant sur un marché de niche – donc très rentable –, tel que celui des équipements de cabine qui nécessitent d’être renouvelés plusieurs fois sur le cycle de vie d’un avion. D’autres, ne croyant pas à la course à la taille pour espérer faire des économies d’échelle, préfèrent se démarquer en misant sur l’analyse des données, l’intelligence artificielle ou encore la cybersécurité, comme Patrice Caine, PDG de Thales.
Concurrence oblige entre avionneurs, les équipementiers aéronautiques se regroupent, diversifient leurs activités ou encore misent sur les technologies du futur pour rester compétitifs. Dans le contexte actuel, il semble préférable de développer lesdites stratégies, plutôt que de solliciter des subventions gouvernementales, au risque d’être accusé de dumping, comme en fait les frais Bombardier aujourd’hui.