Face à l’augmentation du trafic aérien et aux engagements environnementaux pris par les gouvernements et les entreprises, les compagnies aériennes redoublent d’efforts pour être en mesure de proposer de nouvelles sources d’hydrocarbures, qui soient non seulement verts, mais qui répondent aussi aux diverses contraintes aéronautiques très strictes.
Portrait de la situation
Le secteur aéronautique a bien cerné l’importance de trouver des solutions alternatives au kérosène, qui représente encore aujourd’hui 100 % de l’avitaillement des avions. D’une part, à terme, l’offre de kérosène (estimée entre quatre et six milliards de tonnes par an) ne répondra plus à la demande du secteur (le trafic aérien pèse environ 11 % dans la consommation mondiale de carburant) qui progressera de 1,5 % par an jusqu’en 2030. D’autre part, la pollution liée au trafic aérien constitue un problème sérieux, affectant notamment les zones urbaines prochaines des aéroports (particules de suie, hydrocarbure imbrûlé, bruit…). Bien que les avions ne représentent que 2 % des émissions de gaz à effet de serre, les acteurs aéronautiques se sont fixé des objectifs ambitieux – alors qu’ils ne sont concernés ni par le protocole de Kyoto ni directement pas la Cop 21 – tels que la réduction de 50 % des émissions de CO2 entre 2005 et 2050. De plus, l’Organisation de l’aviation civile internationale a déployé un système de compensation de toute nouvelle augmentation nette de C02 par l’achat de crédit carbone.
Les biocarburants, une histoire de génération
La solution passe par ces énergies, dites non fossiles, qui sont issues de déchets ou de la biomasse et qui peuvent réduire les émissions de gaz à effet de serre entre 50 % et 90 % par rapport au kérosène. Après les biocarburants de la première génération (éthanol provenant de la fermentation alcoolique de sucres issus de l’agriculture – canne à sucre, betterave, céréales), le secteur aéronautique s’intéresse aujourd’hui aux biocarburants de la deuxième génération, à savoir la biomasse lignocellulosique sans concurrence avec l’alimentaire émanant du bois, des résidus forestiers, du miscanthus ou encore de la paille de céréales. Cette deuxième génération se démarque de la première grâce à ses ressources plus importantes, ses coûts de matières premières plus faibles et son meilleur bilan environnemental. À l’heure actuelle, nous pouvons affirmer qu’une troisième génération de biocarburants est en gestation (stade de recherche et de développement) et qui s’articule autour des micro-algues. Le rendement à l’hectare serait trois fois supérieur à celui des oléagineux, et son développement par photosynthèse permettrait de recycler ses fumées et ses effluents liquides.
L’aéronautique, un secteur exigeant
Développer des biocarburants pour le secteur aéronautique représente un défi de taille, étant donné les différentes contraintes et exigences auxquelles il est soumis. D’une part, le carburant produit doit pouvoir être utilisé à l’échelle mondiale et donc répondre aux exigences internationales en ce qui concerne la qualité de carburant – le Jet A/A1 pour l’aviation civile – au terme d’un processus long et coûteux. D’autre part, le carburant doit faire montre d’une adaptabilité et d’une résistance à toute épreuve en termes de température (amplitude de 100 degrés entre les hautes altitudes et le tarmac), de pression, mais pas seulement… Étant le seul fluide hydraulique à bord, le biocarburant devra également jouer le rôle de radiateur et être très stable à l’oxydation. Actuellement, certains aéroports intègrent des biocarburants dans le kérosène pour certains vols commerciaux, tels que Los Angeles (30 % de biocarburants), Oslo, Genève, Toulouse… La liste devrait vite s’allonger.
Le développement de ce marché a beau être long, coûteux et semé d’impondérables (nécessité d’avoir un baril entre 200 $ et 250 $ pour que les biocarburants soient rentables), il l’est plus que nécessaire pour l’avenir tant du trafic aérien que de notre planète.